On se retrouve aujourd’hui avec le troisième volet des aventures d’Alexis Castells et Emily Roy, les deux héroïnes de Johana Gustawsson, dans Sång. Malgré un léger manque d’empathie pour les personnages, j’avais beaucoup aimé les deux premiers tomes, Block 46, en lien avec les horreurs de la Seconde Guerre Mondiale, et Mör, où il était question de Jack l'Éventreur à la fin du 19e siècle. Cette fois, c’est du côté de l’Espagne franquiste que l’autrice nous emmène.
Le récit alterne entre les exactions commises par les partisans de Franco dans les années 30 à 50, et le meurtre d’une famille dans la Suède contemporaine. Et à nouveau, dans la partie historique, on ne nous épargne rien des horribles traitements subis par les opposants au régime, y compris leurs femmes et leurs enfants. Ce lien avec le passé est à la fois la marque de fabrique de Johana Gustawsson -on le retrouve dans chacun de ses précédents livres- et son plus grand atout, puisqu’elle excelle à nous propulser ainsi en arrière.
La recette est clairement toujours la même et pourtant, on passe un bon moment. Sång est un véritable page-turner. Non pas que les héroïnes soient spécialement en danger, non, c’est plus qu’on a vraiment envie de savoir, de comprendre le lien entre les deux époques et les différents protagonistes. Il est aussi question de procréation assistée -une problématique bien connue de l'autrice- et des dérives de certaines cliniques privées qui, poussées par la course à la clientèle et aux bons résultats, refourguent les embryons “oubliés” ou mentent sur les critères de sélection des donneurs de sperme. Un joyeux mélange -façon de parler !- qui tisse une intrigue bien ficelée même si, comme dans Mör, j’en ressors avec la sensation d’un dénouement un peu tiré par les cheveux quand même, tout convergeant toujours vers les héroïnes et leurs proches.
Du côté des personnages, j’ai retrouvé une Emily Roy dont je n'avais pas le souvenir, plus désagréable que jamais, qui répond par monosyllabes quand elle prend la peine de répondre, et une Aliénor -pour rappel, victime du syndrome d’Asperger-, qui s’assume soudain un peu trop facilement. Au final, je crois que c’est ce qui m’a le plus perturbée, ce que j’ai perçu comme un brusque changement de personnalités alors qu’il ne s’est pas écoulé tant de temps dans le récit depuis les évènements de Mör. Après, c’est peut-être aussi ma mémoire qui flanche depuis 2017, qui sait ?
En bref, un troisième opus plaisant et intéressant à lire, qui contient tous les éléments pour nous faire passer un excellent moment de lecture. Petit bémol sur deux personnages dont le comportement m’a semblé un peu trop appuyé et manquant de naturel, ainsi que sur un final un peu tiré par les cheveux. Il n’empêche que je l'ai dévoré et que je vais, de ce pas, me procurer le roman suivant de Johana Gustawsson, Te tenir la main pendant que tout brûle, un one-shot a priori. Est-ce que certains d'entre vous l'ont lu ?
Editions Bragelonne (2019) - 278 pages - Support numérique - Thrillers & Polars
[Sång] : nom fém. En suédois, signifie « chanson ».
En Suède, une famille est massacrée dans sa luxueuse demeure. Ce terrible fait divers rappelle sur ses terres Aliénor Lindbergh, une jeune autiste Asperger récemment entrée comme analyste à Scotland Yard : ce sont ses parents qui ont été assassinés. Avec son amie Alexis Castells, une écrivaine spécialisée dans les crimes en série, la profileuse Emily Roy rejoint sa protégée à Falkenberg, où l’équipe du commissaire Bergström mène l’enquête. Ensemble, elles remontent la piste du tueur jusqu’à la guerre civile espagnole, à la fin des années 1930, lorsque le dictateur Franco réduisit toute résistance au silence, dans le sang.
Site de l'autrice : http://johanagustawsson.com/fr/
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