Le gang des rêves, de Luca Di Fulvio

Je dois vous l'avouer : en ouvrant Le gang des rêves, de Luca Di Fulvio, j'étais complètement en dehors de ma zone de confort. Habituée aux dragons, aux vaisseaux spatiaux et aux mondes parallèles, je me suis retrouvée plongée dans le New York du début du XXe siècle, entre immigration italienne et gangsters. J’avais lu le quatrième de couverture, je savais bien ce que je faisais, mais quand même… Contre toute attente, ce roman m'a emportée avec une facilité que je n’avais pas anticipée.

L'histoire nous emmène dans les bas-fonds de Manhattan, suivant le parcours de Christmas Luminita, jeune immigré italien aux prises avec la dure réalité de l'American Dream. Di Fulvio déploie une fresque sociale ambitieuse, mêlant saga familiale et chronique urbaine dans une Amérique en pleine mutation. Une première excursion dans l’univers de l'auteur italien, bien connu pour ses talents de conteur.

Ce qui frappe d'emblée, c'est la construction des personnages. Christmas n'est pas un héros parfait, loin de là. Ses failles, ses doutes, ses choix parfois discutables en font un protagoniste profondément humain. Di Fulvio excelle à camper des héros attachants, de la mère courage Cetta à la fragile Ruth, en passant par les figures plus ou moins anonymes que Christmas va croiser sur sa route. Chacun porte en lui une part de cette quête universelle de dignité et de reconnaissance qui traverse l'œuvre.

La plume de l’auteur se révèle particulièrement efficace dans ses descriptions d’une Amérique industrielle naissante. Les odeurs du Lower East Side, le vacarme des chantiers, la violence sourde des règlements de comptes : tout prend corps sous sa plume avec une précision documentaire qui n'entrave jamais le récit. Di Fulvio maîtrise parfaitement l'art du mélodrame sans jamais tomber dans la facilité.

Pourtant, au fil des pages, une étrange sensation m'a envahie : n'avais-je pas déjà lu cette histoire quelque part ? Non pas que Di Fulvio manque d'originalité, mais certaines situations, certains retournements narratifs évoquent des échos familiers. Cette impression de "déjà-lu" s'est imposée à plusieurs reprises, sans que je puisse vraiment l'expliquer. Était-ce la structure du récit d'apprentissage ? Les codes du roman de gangsters ? Je ne saurais le dire.

Cette sensation troublante n'a cependant pas entamé mon plaisir de lecture. Car Le gang des rêves possède cette qualité rare : il nous happe dès les premières pages et ne nous lâche plus. L'intrigue, menée de main de maître, alterne habilement entre moments d'intimité et séquences d'action. Di Fulvio sait ménager ses effets, construire ses tensions et surprendre son lecteur au moment opportun.

Le roman fonctionne aussi comme une réflexion sur l'identité et l'appartenance. Christmas incarne une génération d'entre-deux, ni tout à fait européens ni encore américains, contraints de se réinventer pour survivre et sortir de leur condition. Hors de mes habitudes de lecture, j'y ai trouvé un plaisir inattendu, porté par des personnages mémorables et une intrigue bien menée. Une expérience à renouveler.

Note : 

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Le gang des rêves, de Luca Di Fulvio
Pocket (2017) - 945 pages - Support papier - Littérature historique

Une Italienne de quinze ans débarque avec son fils dans le New York des années vingt... L'histoire commence, vertigineuse, tumultueuse. Elle s'achève quelques heures plus tard sans qu'on ait pu fermer le livre, la magie Di Fulvio. Roman de l'enfance volée, Le gang des rêves brûle d'une ardeur rédemptrice : chacun s'y bat pour conserver son intégrité et, dans la boue, le sang, la terreur et la pitié, toujours garder l'illusion de la pureté.

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