La désolation, de Pierre Bordage

On ne présente plus Pierre Bordage. Plusieurs fois primé, c’est un auteur dont je n’avais pourtant, jusqu’ici, lu que le premier tome de la saga Les guerriers du silence, que j’avais d’ailleurs trouvé bien long. Un peu dubitative, je me suis dit que j’allais essayer de le lire en fantasy plutôt qu’en science-fiction, histoire de voir si j’accrochais davantage, et j’ai choisi pour cela de me lancer dans le diptyque Arkane. Ce n’est pas totalement une réussite, il faut bien le dire…

Après une crue dévastatrice, les déesses du fleuve Odivir décidèrent de ne sauver que sept familles qui furent ensuite à l’origine de la fondation de la cité d’Arkane. Quelques millénaires de cohabitation plus tard, une coalition élimine la Maison du Drac, l’une des familles fondatrices, mettant en péril la ville tout entière. Seule survivante de ce massacre, traquée par les autres maisons, la jeune Oziel se met en devoir de rejoindre son frère aîné, exilé dans les Bas de la cité.

En parallèle, on suit Renn, apprenti sculpteur de pierre, qui fuit les montagnes à l’approche d’une horde dévastatrice de guerriers, et Noy, cinquième fils de la Maison du Corridan qui se retrouve, bien malgré lui, au plus près des conspirateurs.

Dans ce roman, Arkane est quasiment un personnage à part entière. On découvre la ville sur les traces d’Oziel, ses différents niveaux, les castes et organisations qui y sévissent. J’ai beaucoup aimé cet aspect, même s’il m’a manqué quelques détails sur la Désolation qui donne son titre à ce premier tome. L’auteur propose un univers intrigant et plutôt bien construit, et c’est clairement le point fort de cette lecture.

En revanche, l’intrigue est très classique, pour ne pas dire prévisible, et les personnages sont clichés au possible. Ils manquent terriblement de profondeur et de relief. La trame qui entoure Oziel est cousue de fil blanc, et il manque beaucoup trop de détails sur le drac et la manière dont s’instaure leur relation pour que le final passe pour autre chose qu’une énième facilité scénaristique. De son côté, Renn joue un peu le rôle du benêt de service tant il lui faut de temps pour appréhender ce que le lecteur anticipe depuis des chapitres entiers. Quant à Noy, le moins que l’on puisse dire, c’est que ses revirements n’en font pas un héros très sympathique.

Autre point qui m’a dérangée, les mentions permanentes au sexe. Alors certes, on est dans une société d’inspiration médiévale, clairement patriarcale, mais est-ce une raison pour faire de tous les mâles de cette histoire des obsédés sexuels en puissance ? Quand la première réaction du kidnappeur d’Oziel est de baisser ses chausses et de lui montrer son membre viril pour bien lui faire comprendre qu’il est le chef, je ne peux pas m’empêcher de lever les yeux au ciel et de soupirer à fendre l’âme. Tentative de viol, relations incestueuses, soubrettes abusées dans les couloirs des maisons régnantes… Je n'ai vraiment pas eu le sentiment que tout cela servait l’histoire, pas à ce degré en tout cas.

Au final, mon ressenti est donc très mitigé. C’est bien dommage car l’univers était prometteur, mais les personnages peinent souvent à sortir de leurs stéréotypes et l’intrigue est terriblement classique. Je lirai sans doute le second tome pour avoir le fin mot de l’histoire, mais sans l’enthousiasme que j’avais placé dans celui-ci, et ce sera probablement ma dernière incursion dans les écrits de Pierre Bordage.

Note : ☆☆

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Arkane, tome 1 : La désolation, de Pierre Bordage
Editions Bragelonne (2017) - 448 pages - Support numérique - Fantasy

Arkane : une ville labyrinthique, bâtie selon la légende par sept maisons toutes-puissantes, et dont les luxueux niveaux supérieurs sont occupés par un pouvoir corrompu. Là, ont cours intrigues incessantes, empoisonnements, meurtres, magie noire et décadence. Après le massacre de son clan, Oziel, fille de la maison du Drac, s’enfuit des Hauts de la ville. Elle espère gagner les Fonds afin de rejoindre son frère condamné, et de lever une armée parmi les prisonniers du terrible bagne dans les profondeurs de la cité. Oziel rencontrera sur son chemin Renn, un apprenti-enchanteur de pierre, et Orik, guerrier venu d’une lointaine contrée…

2 commentaires

  1. Moi non plus, je ne connaissais pas tellement cet auteur et ce premier tome m'a laissée très dubitative. L'univers est intéressant avec cette histoire de maladie et d'animaux totems de grandes familles. Mais comme tu l'écris, les personnages sont caricaturaux, l'intrigue ne m'a pas surprise et la sexualisation à outrance m'a lassée. Le traitement des femmes dans cet univers est problématique.

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    1. Est-ce que tu avais lu la seconde partie, du coup ?

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