La rivière de l'oubli, de Cai Jun


On se retrouve aujourd’hui avec un auteur chinois, maître du suspens dans son pays et même surnommé le “Stephen King chinois” ! Pareil surnom garantissait mon intérêt pour Cai Jun et La rivière de l’oubli, bien sûr, mais la déception est d’autant plus grande quand on passe un peu à côté du livre. Étonnamment, j’étais plutôt bien rentrée dans l’histoire, c’est après que les choses se sont gâtées, mais commençons par le commencement.

C’est l’histoire de Shen Ming, professeur de chinois, victime d’un injuste complot et assassiné un soir de l’année 1995. Quelques mois plus tard, naît un enfant du nom de Si Wang, réincarnation de la victime, obnubilé dès l’enfance par une seule et unique pensée : celle de se venger de tous ceux qui lui ont fait du tort dans sa vie antérieure.

“On dit en Chine qu’à partir de la mort, l’être humain doit passer par la Porte des Fantômes, le Sentier des Sources Jaunes et juste avant d’atteindre le palais de l’au-delà, par le Fleuve de l’Oubli. Après avoir traversé ce dernier par le pont enjambant les eaux tumultueuses, on est prêt à se réincarner dans l’utérus d’une femme. À l’entrée du pont, une vieille femme nommée MengPo, se tient assise, un bol de soupe à la main. Si vous buvez cette soupe, vous pourrez traverser la rivière et oublier. À défaut, c’est une tout autre histoire et c’est l’idée même de mon roman : le destin de quelqu’un qui, n’ayant pas avalé la soupe de MengPo, vient au monde, avec la souffrance et les regrets d’une vie antérieure, l’amour et la haine…”

Une intrigue originale au cours de laquelle le lecteur va découvrir tout un pan des coutumes et croyances chinoises. En plus de la réincarnation, dont le thème est omniprésent dans l’histoire, on découvre la vie dans cette Chine communiste de la fin du XXe siècle et elle est très différente de la nôtre. Les noms des personnages, les attitudes des gens les uns envers les autres, cette espèce de servilité qui semble être une marque de respect, tout m’était étranger et j’ai vraiment apprécié le voyage pendant toute la première partie du livre. Mais cela me demandait un effort d’imagination dont j’ai malheureusement fini par me lasser.

L’enquête, menée sur plusieurs années, traîne vraiment en longueur et ce que je considérais tout d’abord comme un dépaysement rafraîchissant a fini par me peser. Les références poétiques, nombreuses, m’étaient complètement étrangères. Les noms chinois se ressemblaient tous, à mon oreille d’occidentale, je mélangeais les personnages, je ne savais plus qui était qui et cela rendait ma lecture un peu laborieuse. En outre, c’est probablement une question de culture, mais les dialogues et certaines attitudes me paraissaient manquer de naturel. La mère du héros, la fille dont il tombe amoureux et même Si Wang lui-même sont juste trop parfaits pour être crédibles. Tout comme le nombre croissant de personnes qui, au fil du temps, devinent que Shen Ming réincarné se cache derrière l’identité de Si Wang.

Bref, j’ai fini par ne plus y croire, tout simplement. Jusqu’au retournement de situation final qui m’a paru tiré par les cheveux. C’est dommage car les bases de l’intrigue étaient vraiment chouettes. L’envie qui m’animait était celle de découvrir quelque chose de différent et j’ai été servie. Je n’ai certes pas tellement accroché, mais c’est aussi pour moi l’une des raisons d’être des services de presse : s’ouvrir à de nouvelles perspectives de lecture. Alors dans tous les cas, un grand merci à NetGalley et aux éditions XO pour cette découverte.

Note : ★★★☆☆

Plus d'informations

La rivière de l'oubli, de Cai Jun
Editions XO (2018) - 484 pages - Support numérique - Thrillers & Polars

Chine du Nord, juin 1995. Shen Ming, jeune et brillant professeur, est suspecté d'avoir assassiné une lycéenne. Quelques jours après, il est poignardé près de l'école, dans une usine désaffectée. Neuf ans plus tard, le mystère s'épaissit. Les présumés meurtriers du professeur sont envoyés, eux aussi, au royaume des morts. La rumeur se répand alors : et si Shen Ming avait traversé la rivière de l'oubli pour se réincarner et se venger ?

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