18 Barnfield Hill, de Robert Goddard

Romancier britannique prolifique, Robert Goddard s’est taillé depuis les années 1980 une réputation discrète mais solide dans le paysage du thriller anglo-saxon. Ses récits, ancrés dans des intrigues à tiroirs où le passé resurgit pour troubler le présent, mêlent enquête, secrets de famille et manipulations psychologiques. 18 Barnfield Hill, première plongée pour moi dans l’univers de cet auteur, ne déroge pas à la règle et a réussi à m’emporter.

Nous sommes à Tokyo en 2019. Wada est l’assistante d’un détective privé chargé d’élucider la mort d’un riche homme d’affaires japonais à Londres à la fin des années 1970. Juste avant d’être mortellement renversé par une voiture, son patron l’envoie sur place, pour rencontrer une personne qui prétend avoir des informations. Son enquête la mènera à Exeter, au 18 Barnfield Hill, une maison qu’habitaient en 1977 huit étudiants activistes prônant pacifisme, féminisme et socialisme, jusqu’à ce que deux d’entre eux se noient dans des circonstances mystérieuses.

De Tokyo à l’Islande, en passant par Londres et les plages des Cornouailles, la narration alterne entre Wada et Nick, un professeur de dessin londonien, dont la mère faisait partie des activistes. Une enquête liée à la mafia japonaise, les retombées de l’attentat au gaz sarin dans le métro tokyoïte en 1995, des accords commerciaux frauduleux autour d’options d’achat de terres rares en Islande et ailleurs, une paternité dissimulée… Les thématiques sont nombreuses, mais l’auteur excelle à construire une intrigue qui ne laisse aucun temps mort. Le style est fluide, efficace, pleinement au service du récit.

Les personnages sont tout sauf des héros. Wada, quinquagénaire veuve, est présentée comme discrète, au point d’en être presque invisible. Mais cette réserve cache une ténacité redoutable. Elle est capable de traquer la vérité malgré toutes ses blessures personnelles et on se surprend à s’y attacher au fil des pages. Nick, de son côté, est en quête de ses origines. Fils d’une militante du groupe de 1977, il découvre que sa mère lui a menti toute sa vie. Bien qu’ébranlé par cette révélation, il décide de passer à l’action et de se mettre en quête de ce père inconnu, quitte à se mettre en danger.

On les observe évoluer, se débattre, se compromettre parfois, avec une forme de distance qui n’est pas déplaisante. Cela sert même, à certains moments, l’ambiance légèrement froide et feutrée du roman. En tout cas, leur complexité psychologique est bien réelle, sans pour autant chercher à forcer le lecteur à s’identifier à eux. Si bien que, sans révolutionner le genre, 18 Barnfield Hill s’impose comme un très bon roman à suspense, finement écrit et solidement construit. Une belle réussite et une vraie bonne surprise ! J’ai beaucoup aimé.

Note : 

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18 Barnfield Hill, de Robert Goddard
Sonatine (2024) - 408 pages - Support papier - Thrillers & Polars

1977. Huit jeunes étudiants activistes se partagent une maison au 18 Barnfield Hill, à Exeter. Ils y prônent le pacifisme, le féminisme, le socialisme. Jusqu’au jour où deux d’entre eux, Alison et Peter, disparaissent dans des conditions étranges.
2019. Umiko Wada travaille pour un détective privé tokyoïte. On lui demande de se renseigner sur le suicide d’un homme d’affaires japonais dans une chambre d’hôtel londonienne, à la fin des années 1970. Rapidement, son enquête s’oriente vers les ex-locataires du 18 Barnfield Hill. Si pour la plupart ceux-ci se tiennent aujourd’hui à distance de leurs idéaux de jeunesse, il suffit de bien peu pour faire resurgir les fantômes du passé.

Le site de l'auteur : https://robertgoddardbooks.co.uk/

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